Hommage musical à Anne Sylvestre et à la chanson française

Le spectacle Là où j’ai peur, j’irai est porté par Mélanie Chappuis et Madeleine Piguet Raykov et se donne comme une approche théâtrale et musicale centrée sur la voix conteuse d’Anne Sylvestre. Dans l’émission Vertigo du 30 octobre, Mélanie Chappuis, journaliste et autrice, rappelle que, loin d’être perçue comme une figure passagère, l’artiste demeure éternelle et ses chansons conservent une forte actualité à l’écoute.

La pièce se déploie dans une petite librairie avec bar et piano. Trois femmes y donnent vie à des échanges et à des interprétations des chansons d’Anne Sylvestre, évoquant chacune leur relation personnelle avec l’artiste, leur rencontre et les expériences qui l’ont marquée. Elles apprennent également le décès de l’artiste survenu en 2020 (1934-2020).

Une voix parfois décrite comme datée

La voix d’Anne Sylvestre est parfois décrite comme légèrement datée, selon Mélanie Chappuis, qui rapproche cette tonalité de celle de Brassens. Le spectacle propose toutefois une réinterprétation des textes par Lorianne Cherpillod, Alexandra Marcos, Maria Mettral et Marc Berman, offrant une relecture des mots de l’autrice et une manière différente d’entendre ses textes.

Carrière et reconnaissance

Dans les années 1960 et 1970, Anne Sylvestre connaît une grande popularité et se produit à la télévision aux côtés de grands noms comme Brassens, Moustaki ou Barbara. Pour ses chansons, elle reçoit à quatre reprises le Grand Prix international du disque de l’Académie Charles-Cros.

Même durant sa carrière, elle évoquait le fait d’être une femme un peu oubliée. Son empreinte demeure toutefois: ses chansons pour enfants, les célèbres Fabulettes, ont marqué plusieurs générations. Certaines pièces ont été reprises par des artistes plus jeunes, telles que Jeanne Cherhal, Albin de la Simone et Vincent Delerm.

Une artiste féministe et engagée

La comédienne Lauriane Cherpillod a sollicité Mélanie Chappuis pour écrire une pièce en hommage à Anne Sylvestre, souhaitant une œuvre humaine, intime et universelle. L’autrice décrit cette collaboration comme une aventure personnelle autant qu’un projet artistique.

Avec humour et tendresse, les protagonistes évoquent ensemble leurs souvenirs d’Anne Sylvestre à travers les chansons et les voix qui se répondent. Le récit retrace aussi le parcours de l’artiste, son engagement humaniste et féministe, et les épisodes familiaux difficiles liés à son père, décrit comme collaborationniste notoire. Selon la dramaturge, cette origine familiale a pu nourrir son engagement envers ceux qui étaient exclus, notamment les homosexuels et les femmes victimes d’injustice.

En dehors de son répertoire pour enfants, les thèmes des chansons d’Anne Sylvestre résonnent aujourd’hui avec l’actualité. L’artiste avait le talent d’aborder des sujets sérieux avec légèreté et ironie, ce qui rend hommage à cette figure majeure de la chanson française, parfois oubliée.

Propos recueillis par Pierre Philippe Cadert.

Là où j’ai peur, j’irai, adaptation de Mélanie Chappuis et Madeleine Piguet Raykov, est présentée à Genève par L’Étincelle du 5 au 8 novembre 2025.

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